L’échange des idées est un jeu intelligent, en particulier entre les hommes de différentes cultures, non seulement on peut se connaître, mais aussi les nouvelles idées sont nées de ce jeu.

 Valéry Giscard d’Estaing, Démocratie française, Préface inédite, Fayard 1978

  C’est un livre il y a 37ans, mais il me semble mériter de relire aujourd’hui, ce n’est pas parce qu’il est écrit par le Président, mais parce que je le regarde comme un savant français. En fait, la majorité des problèmes qu’il a posés s’aggrave plus qu'auparavant. L’ambition de l’ancien président est de chercher un consensus philosophique pour la France en améliorant notre démocratie, une nouvelle Grèce est bien à ce sens. Les faits et la société française se changent avec le temps, cependant l’essence de ce livre demeure jusqu’à un jour où la France revive.   

   P23

« Le temps viendra. Le temps, quatrième dimension de la relativité, et sans doute première dimension de l’homme d’État. Le temps dont j’ai appris la valeur d’instrument de la leçon personnelle du Général de Gaulle. Le temps, seul passage entre la passion et la raison. »

 

-          Le temps est aussi seul juge entre la passion et la raison, la patience est un indice reflétant l’histoire d’une nation ayant une tradition longue, comme la France et la Chine. La patience devant le temps est un comportement raisonnable, intelligent, voire aristocratique.  

 

 P24

« Quel est donc le rôle de la France ? D’abord recherche l’excellence, dans son organisation sociale, dans sa capacité professionnelle et intellectuelle, dans son aptitude à comprendre les forces qui mènent le monde de notre temps ; être une nouvelle Grèce. »

 

-          La Grèce antique est morte, mais la Révolution française est toujours vivante, si la Grèce est le berceau de la civilisation occidentale, la France, depuis 1789, est celui des valeurs universelles pour l’Homme.

 

« Mystificateur, le marxisme le devient quand, tout en se dérobant aux exigences de la science, il prétend à un statut scientifique ; quand il désigne dans le pouvoir économique la source unique de l’oppression ; quand il réduit l’histoire des peuples à la lutte des classes ; quand il confère à l’une d’entre elles un rôle messianique et rédempteur. »

 

-          Bien dit, je pense que c’est pour cette raison que ce livre n’est jamais traduit en chinois.

 

 P57

« L’intervention de l’État peut constituer, en dernier ressort, non une menace pour la liberté, mais la vraie garantie de la liberté des plus faibles. »

 

-          Malheureusement, en réalité, tout au contraire, on demande à l’État de réagir en premier ressort, c’est l’origine des chaos d’aujourd’hui.

 

 P63

« Trois directions apparaissent avec force :

- notre société, au lieu d’accepter son morcellement en fractions ou en groupes, dominants et dominés, doit tendre à réaliser son unité par la justice.

- elle constituera une communauté d’hommes libres et responsables.

- elle sera une société de communication et de participation.  »

 

-          37 ans après, on est très loin de ce concept, en particulier sur le dernier point, la communication devait être mieux entre nous qu’avant grâce à l’Internet, cependant elle est kidnappée par les représentants des groupes sociaux, qui ne représentent plus la société.  

 

Chapitre III : vers l’unité par la justice

P70

« L’unification de notre société n’implique pas une rupture dramatique avec son évolution passée, mais l’accentuation de cette évolution. »

[…]

« Des mots simples suffisent à exprimer l’un et l’autre : justice et solidarité. »

P71

« La justice consiste en l’élimination de la misère, la disparition des privilèges et la lutte contre les discriminations. »

P72

« La justice, c’est aussi la suppression des privilèges. »

 

-          L’ancien président essaie de donner une définition sur ‘‘le consensus social’’, comme le titre de chapitre : vers l’unité par la justice. L’unité comme une base de la discussion, il s’agit de la différence des façons au lieu des conflits idéologiques. Dans la Chine antique, la Dynastie Han (130 av. J. –C.), le Confucianisme synthétisant tous les courants philosophiques et politiques devient la philosophie étatique, comparable à la valeur « République » de nos jours, c’est le consensus social à la chinoise. Le point commun entre les deux est que les deux - «République » et « Confucianisme » sont tous soutenus par l’État. Mais la différence est leur origine, parce que la «République » est née du combat autour de la laïcité, il s’agit de la prépondérance de l'idéologie à l’humain, parce que c’est un combat, une révolution. Mais le « Confucianisme » est né de l’ordre familier, social, et éthique, il s’agit de la prépondérance de l'humanisme à l’idéologie, et puis dès son avènement au pouvoir, il devient la pensée politique totalement dominante. Par contre, en France, la «République » née accompagne avec la démocratie qui se caractérise par la compétition des partis politiques représentants des idéologies, donc c’est très difficile de parvenir au consensus social, en particulier au régime démocratique existant qui pousse la division sociale commise par les partis politiques. Donc, VGE utilise les mots neutres comme justice, solidarité pour transcender les idéologies, c’est une façon typiquement juste-milieu à la française, c’est aussi son caractère orléaniste. Malheureusement, ses travaux sont arrêtés par les socialistes en 1981.

 

 

P73

« Le sentiment de la justice comprend et admet les réussites soudaines de quelques artistes, de quelques grands avocats ou médecins, de quelques industriels – je les souhaiterais plus fréquentes -, celles de quelques grands savants et de quelques intellectuels, qui constituent la contrepartie d’un effort de création exceptionnel. »

 

-          VGE met l’importance des intellectuels, c’est une très bonne idée, mais si l’on étudie l’histoire des intellectuels français engagés, leur réussite est très loin de la pensée de Weber sur le savant et le politique. Il y a deux obstacles principes devant les intellectuels français au politique : le premier est le système électoral existant dominé par les partis, le deuxième est l’incompétence politique des intellectuels eux-mêmes.

 

P78

« L’inégalité du talent et du courage est dans la nature humaine ; la justice n’est pas de la nier. Mais elle est de faire en sorte que, quel que soit le milieu d’origine, les personnalités de nos enfants puissent se développer et trouver dans la vie sociale, à mérite égal, des chances équivalentes. Une démocratie sincère doit fixer cet objectif au premier rang de ses ambitions, sans ignorer que sa réalisation requiert une longue patience et d’immenses efforts. »

P82

 « Une tout autre attitude est possible, et elle est seule digne d’une société démocratique : prendre objectivement la mesure de ce qui n’est pas juste et mettre en œuvre, sans lenteur ni précipitation, les correctifs nécessaires. »

 

-          Le mot clé est la patience que j’ai abordé tout à l’heure. L’impatience de l'homme démocratique dit par Dominique Schnapper, est le produit de la démocratie elle-même. Cependant, il convient de réfléchir sur le rôle de l’État devant la société, l’intervention étatique n’est qu’un pulse, il faut que la société s’améliore. L’État ne remplace pas la société. La question fondamentale est : qu’est-ce que la démocratie d’aujourd’hui, ou la démocratie 2.0 ou 3.0 ?

 

 

P83  Chapitre IV : une communauté d’hommes libres et responsables

P86

« (Libertés de la vie professionnelle.) Nécessite la « seconde chance » offerte par la formation permanente.)

P87

« Notre société se fonde sur la responsabilité de l’individu. »

P93

« C’est également à partir de l’homme que doit être conçue la grande œuvre de l’éducation et de la formation. »

P94

« L’éducation doit développer aussi bien l’imagination et la sensibilité que l’intelligence, l’habileté manuelle que la capacité d’abstraction. »

 

-          L’homme responsable repose sur la compétence physiologique et psychologique face à la crise, l’éducation doit apprendre aux citoyens à être responsable d’eux-mêmes au lieu d’en devoir à la société. L’éducation doit former les citoyens ayant toujours la motivation de s’améliorer pour s’adapter au changement du monde, au lieu de se cacher dans les bras de l’État.

 

 P110

« Le pluralisme de la société tout entière implique que les divers pouvoirs à l’œuvre dans nos sociétés ne puissent en aucun cas se confondre, et notamment les quatre types essentiels de pouvoirs que sont : le pouvoir d’État, le pouvoir économique, le pouvoir des organisations de masse et le pouvoir de la communication de masse. C’est le sens nouveau que revêt aujourd’hui la règle de la séparation des pouvoirs. »

 

- Il a raison, parce que la théorie de la séparation des pouvoirs ne repose pas sur le système des partis politiques. Mais, puis qu’il l’a dit il y a 37ans, il convient de réfléchir à l’ère d’Internet.

 

 P112

« La pluralité nécessaire des organisations de masse est officiellement admise aujourd’hui par tous, s’agissant notamment des partis politiques. Ralliement sincère, c’est une autre affaire, mais en tout cas, ralliement. »

 

-          Je le comprends bien à cette époque où il n’y a pas d’Internet. Je ne suis pas d’accord aujourd’hui, il est souhaitable de mettre en question le système des partis politiques, pourquoi pas les représentants indépendants/sans étiquette ?

 

 

P170

« Les principales familles politiques ont en commun une même conception de l’organisation sociale. Leurs divergences se situent à l’intérieur de cette conception. Chacune des équipes reconnaît à l’autre l’aptitude à maintenir l’essentiel. »

P170

« Leur rivalité n’est pas une guerre, mais une compétition. Leur alternance au pouvoir ne représente pas une suite de bouleversements chaotiques, annoncés comme des drames et ressentis comme des révolutions, mais une suite d’inflexions dans la progression de la société. En confiant alternativement la conduite de leurs affaires à deux équipes opposées, mais partageant la même philosophie de base, ces pays concilient les nécessités de la continuité et celles du changement.»

P171

« L’état de divorce idéologique […] tout se passe comme si le débat politique n’était pas la compétition de deux tendances, mais l’affrontement de deux vérités qui s’excluent. Son style n’est pas celui d’une délibération de citoyens décidant ensemble de leurs affaires, mais celui d’une guerre de religion, à peine tempérée par la cohabitation.  »

 

-          Le politique devait sortir de la politisation en respectant le consensus philosophique qui est les vrais travaux à nos jours.

 

 P175    Chapitre XII : la démocratie française dans le monde

P176

« Deux attitudes guideront son action extérieure : la volonté de l’indépendance et la pratique de la solidarité et de la coopération. »

 -          Face au monde nouveau, aux puissants nouveaux, en tenant compte de notre compétence et notre devoir, l’indépendance repose principalement sur l’indépendance de l’esprit qui sera le guide de l’Homme opprimé par le monopole des groupes d’intérêt, la solidarité sera principalement le meilleur exemple qui encourage l’Homme à se libérer.

 

 P188

« L’édification de notre société pluraliste exclut l’immobilisme, comme elle rend inutile la révolution. Elle passe par la réforme. […] La force du lion et la patience du renard. »

 -          La révolution guidée par le dirigeant puissant et compétent sera les réformes, les réformes guidées par les dirigeants médiocres seront la cause de la révolution.

 

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